Calokilit

Nathalie lit, Lisa aussi, c'est Calokilit !


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Elmer – Gerry Alanguilan

Résumé éditeur :

Octobre 2003. La vie de Jake Gallo est un enfer : il n’arrive pas à trouver de travail, son père vient de faire une crise cardiaque, son frère Freddie est devenu une star du cinéma; mais le plus difficile à avaler, ce sont les frasques sentimentales de sa soeur May, qui s’est mise en tête d’épouser… un humain. Car les Gallo, comme les autres poules et coqs du monde entier, sont subitement devenus conscients en 1979, au grand désarroi de l’espèce humaine. Suite au décès de son père, Jake va découvrir l’histoire de sa famille et de ce dernier, Elmer, qui appartient à la première génération de poulets à avoir dû apprendre à cohabiter avec les hommes.

Mon avis :

Si vous avez envie de lire une bande dessinée ambitieuse, si vous n’avez pas peur des récits d’anticipation, si vous êtes prêt à plonger dans un univers très prenant… Alors Elmer est fait pour vous. Oui, je suis très enthousiaste ! Mais Elmer est un coup de coeur, un vrai, un de ces livres auxquels on repense souvent et longtemps après l’avoir refermé.

Le pitch peut paraître légèrement difficile : des poulets qui gagnent tout d’un coup l’intelligence, la parole, voir l’humanité ? Le lecteur peut se demander où Gerry Alanguilan peut bien vouloir l’emmener. Surtout n’ayez pas peur, dans cette bande dessinée, il sera surtout question d’humanité, de psychologie et de construction de l’être.

Nous avons beau suivre la vie de poulets, Elmer présente une véritable chronique familiale, qui traite de mémoire, de transmission, de filiation, des sujets que j’affectionne grandement. Les relations entre les différents membres de la famille sont au cœur du récit. Jake se débat avec ses propres difficultés (chomage, peur, haine de l’autre…), mais doit aussi gérer ses relations conflictuelles avec son frère, devenu une star du grand écran, et apprendre à accepter la relation amoureuse de sa sœur avec un homme (par homme, j’entends un membre de l’espèce humaine).

L’autre grand thème du récit est, bien sur, le racisme. Comment deux espèces si différentes, qui historiquement avaient une relation de dominant/dominé, peuvent apprendre à vivre ensemble, à se respecter, à oublier les injustices passées. Il y a donc de véritables parallèles avec notre Histoire, avec les génocides, les guerres, les exclusions qui ont construit l’histoire de l’Homme. Et c’est avec ces événements difficiles que Jake va devoir se construire et apprendre à composer.

A la lecture d’Elmer, j’ai été très émue, certains passages sont durs, d’autres touchants. Gerry Alanguilan nous emporte avec lui dans cet univers différent du notre par certains points et pourtant très proche… C’est la grande réussite de cette bande dessinée, Gerry Alanguilan signe un récit intelligent, un ovni peut-être, mais un petit bijou surtout. Une chose est sure, on ne ressort pas de cette lecture sans en garder quelque chose ! Et j’ai hâte d’être à noël pour en trouver un exemplaire sous le sapin !

Une petite citation pour la route :

« C’était comme si quelqu’un avait allumé la lumière. Comme si je m’étais réveillée après un long sommeil, sans me rappeler qui j’étais, où j’étais… et quelle heure il était.
Je ne savais pas grand chose en fait, sauf que j’avais faim. Comme si j’avais toujours eu faim.
Je voulais manger et ce désir me consumait toute entière.
Puis les hurlements ont fusé. Des cris d’horreur, atroces. »

Lisa


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Sweet Sixteen – Annelise Heurtier

Résumé éditeur :

RENTRÉE 1957.
Le plus prestigieux lycée de l’Arkansas ouvre pour la première fois ses portes à des étudiants noirs. Ils sont neuf à tenter l’aventure. Ils sont deux mille cinq cents, prêts à tout pour les en empêcher.

Mon avis :

Sweet Sixteen est un roman pour adolescents basé sur des faits réels, les personnages sont inventés par l’auteur mais les 9 lycéens dont il est question ont bien existé. Il s’agit d’un roman à 2 voix, les chapitres alternent les points de vue de deux jeunes filles : l’une, Molly, est une jeune lycéenne noire qui doit sous peu rentrer au lycée central, l’autre, Grace, est une lycéenne blanche, très bien intégrée et proche des milieux racistes. C’est cette caractéristique narrative qui fait une grande partie de l’intérêt du roman. Au fil des pages on voit les deux jeunes filles évoluer, leurs attitudes changent mais aussi leurs opinions.

C’est un récit réaliste, sans pathos, écrit avec délicatesse. Les personnages sont nuancés, il n’y a pas que des gentils et des méchants, mais bien des adolescents et des adultes qui luttent des deux côtés pour ce qu’ils pensent être juste. Annelise Heurtier réussi à rendre tous ses personnages humains, sans verser dans la caricature. Elle nous parle des adolescences sacrifiées par l’histoire.

L’Arkansas est un état du sud, un état ou l’esclavagisme, puis la ségrégation, sont bien ancrés. Aujourd’hui, cette intégration de 9 élèves noirs peut sembler peu de choses, mais pour l’époque, pour le lieu, c’était inconcevable ne serait-ce que quelques mois auparavant. Molly se retrouve donc au cœur d’un conflit qui la dépasse. Elle fait face à la méchanceté des blancs mais aussi aux rejets des noirs qui craignent pour leur sécurité. Du côté de Grace, le constat est le même, elle ne pense qu’à vivre son adolescence, ses premiers émois amoureux, ses amitiés… sans se soucier de ce qui se passe dans la société qui l’entoure. Mais lorsque Molly intègre sa classe elle se retrouve à devoir prendre position, un choix qui ne va pas être facile.

J’ai vraiment apprécié cette lecture, très fluide et touchante. Le mémo historique à la fin permet de prendre conscience que ce que l’on vient de lire était une réalité. Chapeau bas pour l’édition, très réussie, la couverture retranscrit bien l’ambiance du roman, et les petits portraits des deux personnages principaux au début de chaque chapitres égayent la lecture.

Sweet Sixteen est un roman que je vais conseiller bien souvent je crois.

Lisa


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Championzé : une histoire de Battle Siki – Eddy Vaccaro (illustration) & Aurélien Ducoudray

Résumé éditeur :
Baye Phal, jeune enfant né à Saint Louis du Sénégal, vit d’expédients. Il plonge dans les eaux du fleuve à la recherche des pièces que lui jettent les touristes de passage. Jusqu’au jour où une riche danseuse hollandaise de passage à St Louis, l’adopte pour en faire son boy sur scène et l’embarque avec elle en France. Quand elle repart à Rotterdam quelques mois plus tard, il reste seul à Marseille, car il est sans papiers. Dans la rue, l’enfant survit comme il peut et enchaîne les petits boulots. Il est repéré par un entraîneur de boxe, qui va le transformer en champion. Il devient Battling Siki. Sa carrière s’interrompt le temps de la première guerre mondiale (il est engagé volontaire) et en 1922, après de nombreux matchs minables, il devient champion du monde en battant Georges Carpentier. Après la gloire, ce sera la lente descente aux enfers. Accusé de tricherie, il finira assassiné en 1925…

Championzé

Mon avis :

Vous allez vous dire qu’à chaque fois que je lis une bande dessinée, je la trouve géniale… Encore une fois, oui, un petit bijou !

Le Championzé retrace donc l’histoire de Battle Siki, un boxeur noir au début du XXème siècle.
On y découvre avec horreur les difficultés qu’il rencontrera à cause de sa couleur de peau, que ce soit dans sa vie quotidienne ou professionnelle. Pourtant, il servira sous les drapeaux, de son propre chef, pour défendre la France, qu’il considère comme son pays et trouve donc légitime de prendre les armes à ses côtés. Aucune reconnaissance…
Lorsqu’il perce dans le monde de la boxe, on l’appelle le Championzé (qui comme vous l’aurez compris le compare au singe du quasi même nom). Et ne supportant pas qu’il batte nos chers boxeurs blancs, on tentera de ruiner sa carrière, faisant courir d’impossibles rumeurs, et le calomniant sans cesse. Il connut d’ailleurs une fin tragique.
Alors oui, ici encore on retrouve chez Futuropolis une sublime bande dessinée, au sujet fort et lourd. Les illustrations en bichromie sont à couper le souffle, c’est d’ailleurs ce qui m’a marqué en premier.
Et pourtant ce n’était pas gagné : moi, la boxe…

Voici un petit plus à regarder

Nath à livre


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Les Silences des pierres – Philippe Barbeau et Marion Janin

Résumé éditeur :
« La folie des hommes apporta le deuil et trancha la ville en deux ». Longuement, Philippe Barbeau a poli son texte. Puis, patiemment, Marion Janin se l’est approprié, lui imposant son souffle, sa respiration. Son trait précis, presque précieux, respecte l’universalité du conte, tout en lui imposant une touche très personnelle. « Les pierres ont parfois des silences qui séparent « .
 

Mon avis :

Cet album sort pour moi du cadre des albums jeunesse. Il s’agit d’un album pour les grands enfants, à partir de 10ans, il parle à tous, il parle de sujets universels.

Au commencement, un peuple vit heureux, dans le calme et l’harmonie. Puis la discorde vient, avec elle, il y a la haine, la peur de la différence. Un coiffeur, narrateur, observe l’évolution du monde qui l’entoure. Le tout nous est conté, raconté par Philippe Barbeau. Le ton est grave mais le texte poétique. Il parle de différence, d’identité, de l’homme et de ses travers, mais aussi d’amitié, d’amour et d’espoir. Un petit bijou à mettre entre toutes les mains !

Les illustrations sont magnifiques, très riches en détails. L’univers est minéral, illustratrice, Marion Jani, se plaît à créer des architectures complexes, des escaliers impressionnants. Et les crayonnés de pierres et minéraux extrêmement réalistes sont bluffant de réalisme.

Un vrai conte moderne.

Lisa