Calokilit

Nathalie lit, Lisa aussi, c'est Calokilit !


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Le Tirailleur – Alain Bujak et Piero Macola

Résumé éditeur :
«En 2008 et 2009, à Dreux, j’ai photographié la vie quotidienne d’une résidence sociale Adoma, ex-Sonacotra. J’y ai rencontré Abdesslem, un ancien tirailleur marocain. Il avait alors plus de quatre-vingts ans. Ce reportage terminé, j’ai voulu le revoir. Finalement, nous avons passé des heures ensemble, souvent le matin, autour d’un café clair et très sucré. Je lui demandais de me raconter sa vie. Pêle-mêle, c’est la dernière guerre, la campagne d’Italie, l’Indochine, l’injustice d’une vieillesse miséreuse. Il cherchait dans sa mémoire. Parfois tout venait d’un coup, avec une étonnante précision. Parfois, aussi, il y avait des blancs… Je ne pouvais pas imaginer que l’histoire d’Abdesslem tombe dans l’oubli.»

Mon avis :

J’ai commencé cette lecture un peu au hasard, sans trop savoir ce que j’allais y trouver. Au départ, le sujet ne me tentait pas particulièrement, je ne suis pas une adepte des bds historiques, qu’il s’agisse de récit de guerre ou autres. Et finalement ce Tirailleur fut une expérience assez intense pour moi.

J’ai trouvé ce témoignage vraiment poignant. Déjà la relation qui se noue entre Alain Bujak, photographe journaliste et Abdesslem est très belle, très touchante. C’est ce point de départ qui fait toute la force de cette bd. Alain Bujak arrive à nous faire sentir la lenteur des échanges, la difficulté à s’apprivoiser l’un l’autre pour oser révéler des choses que l’on n’a dit à personne jusque là. C’est tout aussi passionnant que le contenu du récit en lui-même. Abdesslem est un homme fier, plein de pudeur. Se confier, s’épancher n’est pas naturel pour lui et il faudra beaucoup de temps et de patience à son interlocuteur pour découvrir ce pan de sa vie si particulier.
Le dessin de Piero Macola vient soutenir, tout en tons ocres,gris, verts, les souvenirs d’Abdesslem avec beaucoup de douceur et de pudeur. Le lecteur est projeté au Maroc puis en France pour suivre le long périple du jeune homme, enrôlé presque de force dans une armée qu’il ne connait pas. L’injustice qui touche de nombreux tirailleurs marocains ne laisse pas indifférent d’autant plus qu’elle est expliquée ici très simplement, très clairement. il n’y a pas d’esprit de vengeance chez Abdesslem juste de la résignation par rapport à sa situation. Et cela ajoute encore de la force à ce témoignage.

J’ai été très touchée tout au long de ce récit, mais encore plus en lisant le livret à la fin du livre qui relate la voyage qu’a fait Alain Bujak pour rentre visite à Abdesslem rentré au Maroc.

En bref, cette bd est un gros coup de cœur, une bd dont je me souviendrai pendant longtemps.

Lisa


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Brèves du mercredi #16

Les brèves sont de retour, avec, au programme aujourd’hui, deux bandes dessinées qui parlent de maladie. La première traite de la dépression et la deuxième de l’épilepsie. Deux maladies différentes, avec ici un traitement assez proche, puisqu’il s’agit de deux témoignages, poignants.

Chute libre  : carnets du gouffre est le témoignage de Mademoiselle Caroline, qui, après la naissance de son premier enfant, glisse lentement dans la dépression. Son récit retranscrit bien les différentes étapes de sa maladie, de ses premières prises de conscience à l’acceptation d’être malade, les hauts et les bas qui ponctuent son chemin. Les propos sont très clairs, le ton de Mademoiselle Caroline est touchant, parfois drôle et sonne toujours très juste.

Ici pas d’apitoiement, mais un petit livre qui veut déculpabiliser les malades, et poussera certainement leurs entourages à réfléchir un peu plus à leurs réactions. Certains dessins ont été réalisés spécialement pour cet album, mais d’autres ont été réalisés pendant les périodes plus sombres de sa dépression, ce qui rend la bande dessinée encore plus forte. Que l’on soit touché ou non par cette maladie, La chute libre est une bande dessinée agréable qui parlera à tout le monde et dont on se souvient !

Dans La Parenthèse d’Elodie Durand, pas de trace d’humour, le ton est plus sérieux. A travers le personnage de Judith, Elodie Durand livre le récit de son combat contre la maladie qui lui gâche la vie. Apparues petit à petit les absences et malaises de Judith prennent de plus en plus de place dans son quotidien, jusqu’au diagnostic d’une tumeur au cerveau.

Il s’agit bien ici du récit d’un combat, d’une bataille pour guérir, pour aller mieux, pour retrouver des souvenirs, des instants disparus. Judith doit, même une fois la maladie écartée, faire un long chemin pour retrouver qui elle est, qui elle veut être et qui elle a été. Les dessins sont explicites, très clairs sur ce que l’auteur souhaite exprimer. On ne peut pas rester indifférent face à cette parenthèse, une bande dessinée dure parfois, mais très forte et touchante, où l’auteur se livre pour se libérer.

Lisa


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Dans la secte – Pierre Henri & Louis Alloing

Résumé éditeur :
L’itinéraire de Marion n’a rien d’extraordinaire et ne pourrait faire la Une des journaux. C’est ce qui le rend exemplaire : Marion ressemble à n’importe quel adepte de secte, son endoctrinement a été progressif, sans violence. Mais il l’a laissée durablement meurtrie Elle a dû prendre sur elle pour confier son histoire à ses amis auteurs de BD.
Un témoignage poignant réalisé en coopération avec l’ADFI, une des plus importantes associations de lutte contre les sectes. Sa présidente, Catherine Picard en signe d’ailleurs la préface.
 

secte_1Mon avis :

Pour commencer, il est important de dire que cette bande dessinée est un témoignage. Le nom de la victime, Marion, n’est pas le vrai, pour pouvoir la protéger.

Elle explique ici comment elle s’est retrouvée au cœur de la secte scientologue, décrivant dans quel état psychologique elle était, et où elle en était dans sa vie. On découvre avec horreur, que finalement, elle est comme nous. Pas de problèmes insolvables, des amis, une famille. Mais quand même, elle s’est faite happer par la machine.

Ensuite, on y découvre les tactiques utilisées (hé oui, il s’agit bien de tactique, de stratégie) par la secte pour vous garder « prisonnier », en vous abrutissant de fatigue et de travail, ne vous laissant ainsi que peu de chance d’avoir le temps de réfléchir, d’analyser correctement la situation, et de vous rendre compte de l’embrigadement que vous êtes en train de subir. Les contacts humains sont proscrits : vous ne pouvez pas vous faire d’amis au sein de la secte, et bizarre autant qu’étrange, le téléphone, seule ouverture vers l’extérieur, ne fonctionne jamais…

Un témoignage bouleversant, rageant aussi. Marion, ici la victime, finit par s’en sortir. C’est à dire qu’elle arrivera à partir, mais à quel prix ! De retour dans sa vie, elle est harcelée au téléphone, menacée. Son existence devient un enfer, duquel elle a beaucoup de mal à s’échapper.

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Les illustrations sont en dégradées de bleu. Le trait très rond, dédramatise un peu la situation, et adoucit un peu le récit.

Cette bande dessinée me semble importante, par le sujet délicat qu’elle aborde, et qui est mis ici à la portée de tous. N’oublions pas que c’est une histoire vraie, tirée d’un témoignage émouvant.

A lire !

 

Nath à livres

 


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Le jeu des hirondelles – Zeina Abirached

Résumé éditeur :

En avril 2006, sur le site internet de l’Institut National de l’Audiovisuel (INA), je suis tombée sur un reportage tourné à Beyrouth en 1984. Les journalistes interrogeaient les habitants d’une rue située à proximité de la ligne de démarcation, qui coupait la ville en deux. Une femme, bloquée par les bombardements dans l’entrée de son appartement, a dit une phrase qui m’a bouleversé :  » Vous savez, je pense qu’on est quand même, peut-être, plus ou moins, en sécurité, ici. »

Cette femme, c’était ma grand-mère.

Mon avis :

J’ai eu la chance d’assister il y a une semaine à une rencontre avec Zeina Abirached. Pour l’occasion, j’ai donc lu Le jeu des hirondelles, mourir partir revenir. Cette bande dessinée, ce roman graphique est un témoignage de l’auteur. En effet Zeina est née au Liban, à Beyrouth, pendant la guerre, une guerre qui durera pendant les 10 premières années de sa vie.

Ici, elle nous raconte une nuit d’attente dans l’entrée de l’appartement où elle vivait avec ses parents et son petit frère. Ses parents sont partis rendre visite à la grand-mère, et sont coincés chez elle pendant que la ville est bombardée. Pendant cette nuit d’attente, où les heures passent lentement, c’est une partie des habitants qui défilent dans l’appartement, dans cette entrée sensée être la pièce la plus sure de l’immeuble.

Dans cet immeuble c’est tout un échantillon du Liban que l’on retrouve, des personnages hauts en couleurs, tous différents, aux caractères bien marqués. Pendant cette nuit, le lecteur ne verra pas la guerre, il en entendra parler, en entendra les bruits, les déflagrations, mais il partagera surtout un souvenir, un fragment de quotidien, pas mais l’Histoire, mais l’histoire. L’auteur met en avant la solidarité, les relations entre les personnages, les voisins, et l’atmosphère qui règne dans le lieu confiné. Ici , même si la guerre a fait souffrir tout le monde, elle a aussi permis  de rapprocher les habitants de l’immeuble, les poussant à créer leur propre communauté.

La bande dessinée est en noir et blanc, pas de demi-teinte, pas de gris, seulement du blanc, du noir et le talent de Zeina Abirached pour créer des décors pleins de détails tout en contrastes. La jeune femme a une formation de graphiste et cela se sent dans la manière de mettre en scène les décors, de choisir les cadrages. Le dessin qui au départ peut sembler froid, dur, est en fait plein de courbes, de délicatesse.

J’ai beaucoup apprécié cette lecture. Le jeu des hirondelles est une bande dessinée très abordable, elle ne demande pas de connaître grand-chose de la guerre au Liban, pour pouvoir être appréciée à sa juste valeur. Si vous en avez l’occasion, ouvrez-là, jetez un œil aux illustrations et je ne doute pas que vous vous laisserez tenter par cette lecture !

Lisa


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Dans la peau d’un maton – Arthur Frayer

Résumé éditeur :
Que savons-nous vraiment de la prison ? Uniquement ce que veulent bien nous en dire des détenus ou des membres de l’administration pénitentiaire.
Arthur Frayer a voulu aller plus loin. Pour voir par lui-même ce qui se passe dans ce monde clos, ce jeune journaliste a passé le concours de gardien de prison et est devenu, l’espace de quelques mois, un « infiltré ».
En stage à Fleury-Mérogis, puis en poste à Orléans, il raconte ses mois passés en détention. On découvre avec lui, en partageant son inquiétude, son étonnement et souvent sa colère, la réalité des maisons d’arrêt surpeuplées, les humiliations quotidiennes – pour les détenus comme pour les matons –, le désespoir et la folie, la roublardise de tous, le poids de l’enfermement.
Au fil des jours, toutes les certitudes du journaliste vacillent : comment rester juste ? Comment œuvrer à la réinsertion quand on doit exercer un métier épuisant dans des conditions si difficiles ?
De cette expérience hors du commun est né un récit bouleversant, d’une force rare.
 
Arthur Frayer
 

Mon avis :

Encore un livre qui dépote, et qui finalement raconte une histoire folle, et nous montre l’énorme motivation d’Arthur Frayer. Je m’explique.

Arthur Frayer fait des études de journalisme. Il souhaite ensuite écrire sur l’univers carcéral. Pour se faire, il trompe tout le monde, enchaînant des petits boulots divers et variés, passant des concours, dont celui de surveillant de prison. Il brouille les pistes pour pouvoir devenir « maton », sans éveiller de soupçon sur son but final.
Il sera reçu à ce concours, et commence sa formation de surveillant. Il nous raconte ces différents stages, dont un à Fleury-Mérogis, ainsi que les différents « conseils » qu’il entendra lors de sa formation. Puis ensuite il devient vraiment surveillant, n’est plus stagiaire. Je ne rentrerai pas plus dans les détails, pour laisser votre curiosité aux aguets.

Arthur Frayer nous raconte avec brio ce dont il a été témoin, à quel point cela a été dur, mais aussi les belles rencontres. Il ne fait à aucun moment le procès des surveillants, ou des prisonniers. La balance s’équilibre parfaitement, aucun parti pris n’étant adopté.

Un livre que je conseille à tous, ainsi qu’aux « grands » adolescents que le sujet intéresse. Si vous voulez en savoir plus en ayant accès à quelques extraits : Rue89

Nath à livre


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La guerre de Catherine – Julie Billet

Résumé éditeur :
 « Nous allons changer de nom, et nous devrons tous oublier, le temps de la guerre, ceux qui nous ont été donnés par nos
parents. »
Rachel s’appelle désormais Catherine, Catherine Colin. Lorsque les lois contre les Juifs se sont intensifiées, ses parents l’ont confiée à la Maison des enfants de Sèvres. Mais bientôt il ‘ n’y a plus de sécurité nulle part en zone occupée. Un réseau de résistance organise la fuite des enfants juifs en zone libre. Ils doivent du jour au lendemain quitter l’école, leurs camarades et partir avec des inconnus. Ils ne savent pas comment feront leurs parents pour les retrouver. Ils ne savent même pas si leurs parents sont encore en vie.

Mon avis :

Ce texte est tiré d’une histoire vraie, même si les noms ont été modifiés et les faits romancés.

Rachel est une enfant juive qui grandit pendant la deuxième guerre mondiale. Lorsque les lois contre les juifs deviennent plus fortes, ses parents la confient à une école avant-gardiste dans le but de la protéger. Là-bas elle découvre la photographie, qui devient sa grande passion. Les pressions contre les juifs sont de plus en plus fortes et les enfants doivent changer de nom puis fuir.

Rachel devient Catherine et entame un long périple à travers la France, aidée par un réseau de résistance. Ce voyage sera l’occasion pour elle de faire des rencontres qui changeront sa vie. Dans sa fuite, elle emporte son appareil photo, pour garder une trace de toutes les personnes qu’elle rencontrera et faire de ses clichés les témoins de ce voyage.

Ce roman parle de la seconde guerre mondiale, mais d’un point de vue que l’on a rarement l’occasion de voir. Rachel, Catherine, n’est pas du coté des combats, ni même des sévices infligés aux juifs, mais bien de la résistance. Ce texte nous parle surtout d’une jeune fille qui grandit, cherche à survivre, se lie d’amitié, vit ses premiers émois amoureux.

J’ai vraiment été conquise par cette histoire, par la galerie de personnages qui nous est présentée. Ici pas de stéréotypes, les familles qui hébergent Catherine, ceux qui l’aident sur son chemin ne sont pas forcément des résistants forts, puissants, ce sont des gens comme vous et moi qui suivent ce que leur conscience leur dicte.

Le sujet est traité avec finesse et justesse, l’auteur ne tombe jamais dans le voyeurisme, ne cherche pas à nous apitoyer. Je conseille vraiment ce roman, que l’on soit intéressé par l’histoire de la seconde guerre mondiale ou pas.

Lisa


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H.P. Tome 1 : L’asile d’aliénés – Lisa Mandel

Résumé éditeur :
Voilà plusieurs années que Lisa Mandel et L’Association ont ce grand projet en gestation. Voici enfin le premier volume d’une série qui en comportera trois : HP est une grande fresque ayant pour sujet le milieu de la psychiatrie en France depuis les années soixante à aujourd’hui. Lisa Mandel raconte cette évolution historique par le petit bout de la lorgnette, ayant interrogé sur leur parcours des parents et des amis qui travaillent depuis plusieurs décennies dans le secteur psychiatrique.

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Mon avis :

Voila un portrait au vitriol des asiles d’aliénés, ces ancêtres des hôpitaux psychiatriques d’aujourd’hui. Écrit à partir des témoignages de professionnels du domaine, ce premier volume nous présente une médecine psychiatrique cruelle qui ne manquera pas de choquer le lecteur. Le dessin humoristique de Lisa Mandel pourrait atténuer son propos, mais les faits rapportés sont si durs que la bande dessinée reste poignante.  Le bilan est sans concession entre les locaux vétustes et les méthodes dégradantes des employés.
Une bande dessinée dérangeante mais qu’on a du mal à reposer avant la dernière page.

A lire pour en apprendre plus sur ce milieu méconnu. A noter, le tome 2 sortira au début de l’année 2013, et devrait nous permettre de voir l’évolution du domaine sur les années 80.

Lisa

Le site « inofficiel » de Lisa Mandel, qui permet aussi d’accéder aux archives de son blog : Lisa Mandel