Résumé éditeur :
Florent a perdu sa femme beaucoup trop jeune.
Il a tenté d’élever seul sa trop petite Lilie, maladroitement ou certainement pas assez. Et Florent et sa fille se sont perdus à leur tour. Elle l’a laissé encore plus seul pendant 20 ans. Aujourd’hui, à 70 ans, il n’a qu’un souhait, il veut la retrouver avant de mourir ; sa Lilie qui vient maintenant le voir presque tous les jours, mais qu’il ne reconnaît plus.
Mon avis :
Ceux qui me restent est une BD délicate. Ici pas d’esbroufe, seulement de l’authenticité. Le sujet de la maladie d’Alzheimer est traité de l’intérieur, l’auteur nous plaçant dans l’esprit de Florent, malade, perdu entre passé, présent et imaginaire.
Les débuts sont d’ailleurs assez déroutants, j’ai eu du mal à suivre son esprit torturé. Une fois que le lecteur a compris ou il est, comment le récit fonctionne, la fresque dépeinte par Damien Marie frappe de plein fouet.
Au fil des pages, on en apprend de plus en plus sur cet homme. Sur son passé, de sa rencontre avec sa futur épouse aux évènements dramatiques qui le mèneront à délaisser ceux qu’il aime. Le récit prend une dimension supplémentaire en s’attardant sur la vie de Lilie, sa fille, sur ce qu’elle ressent face à la maladie de son père. Le désarroi de Florent, celui de Lile, la solitude qui semble les unir, tout est touchant.
Les dessins de Laurent Bonneau soutiennent totalement le propos. Les décors à peine esquissés parfois, le peu de couleurs qui subsistent, tout est fait pour nous rappeler que nous ne sommes pas dans la réalité mais bien dans l’esprit de Florent.
Je ne suis pas sure que cette bande dessinée plaise à tout le monde, le sujet est trop sensible, en tout cas, à moi, elle m’a parlée.
Résumé éditeur :
Quand elle apprend la mort de son père, Yumiko, jeune graphiste londonienne, doit partir au Japon pour assister à la traditionnelle cérémonie des obsèques. Le voyage au pays de ses origines, jusque dans la ville où elle est née et a grandi, se révèle une succession d’émotions contradictoires et bouleversantes. Qui est-elle devenue loin de chez elle ?
Mon avis :
J’ai lu cette bande dessinée un peu par hasard… La couverture me plaisait bien, je me suis laissée tenter !
La première chose qui m’a plu ici c’est le traitement doux et délicat de sujet parfois difficile à aborder. Yumiko aime sa famille, aime son pays, sa culture mais elle l’a quitté pour faire des études à Londres et pouvoir accéder à des rêves qu’elle n’aurait pu atteindre au Japon. Et c’est de cela qu’il est question au fil des pages. Le décès de son père pousse la jeune femme à revenir sur ses pas, à réfléchir au raison de son départ et à la complexité de ce qui la relie à son pays.
Le thème du deuil est évoqué avec pudeur et simplicité. Les réactions des différents membres de la famille sonnent juste. le personnage de Yumiko est attachant, ses questionnements relativement universels, ne s’appliquent pas seulement aux émigrants. Fumio Obata ne donne pas de réponses toutes faites aux errements de son personnage et laisse a chacun le soin de pousser la réflexion plus loin. Le parallèle fait par l’auteur entre les doutes de Yumiko et l’art japonais du Nô m’a donnée envie d’en savoir plus sur ce théâtre oriental.
Tout le propos de la bande dessinée est mis en valeur par un dessin délicat aux couleurs douces. Le trait est précis et pleins de détails.
Voilà une bande dessinée sans prétention, dont délicatesse et pudeur sont les maître-mots. Une belle réussite pour un deuxième album.
Les brèves de cette semaine sont consacrées à deux auteurs de BD, qui viennent de sortir chacun une BD qui change totalement de l’univers dans lequel les lecteurs avaient l’habitude de les voir !
Histoire d’hommes de Zep, aux éditions Rue de Sèvres.
ZEP, bien connu du grand public pour sa série Titeuf, nous avait habitué à des bandes dessinées humoristiques, chroniques de la vie quotidienne d’un pré-ado gaffeur. Dès 2009, il sort déjà de ses sentiers battus en publiant Happy Sex, recueil humoristique de courtes bd autour du sexe, puis Happy Rock et Happy Girls. Cette année, il s’éloigne encore plus du jeune garçon à la mèche en publiant Histoire d’hommes, une BD plutôt sérieuse, une vraie réussite pour un changement d’envergure !
Histoire d’hommes, c’est l’histoire de quatre types qui dans leur jeunesse étaient membres d’un groupe de rock plutôt bien parti pour faire une belle carrière… Sauf que… une soirée où ils devaient participer à une émission de télé sensée les lancer, tout s’arrête, le groupe se dissout et Sandro, le chanteur, débute une carrière solo. Au moment où la bd commence, presque 20 ans ont passé, Franck, JB et Yvan (le frère de Sandro), les anciens membres du groupe, sont en route pour retrouver le chanteur dans son manoir en Angleterre. Qu’est ce qui les a séparés ? Pourquoi les deux frères ne se sont pas parlés depuis 18 ans ? Voilà ce que vous découvrirez entre ces pages.
Histoire d’hommes est une bd ambitieuse, qui parle d’amitié, d’amour, de deuil, de fraternité aussi et des difficultés à avancer lorsque la vie ne semble pas vouloir faire de cadeaux. J’ai été charmée par ce récit, par sa délicatesse, sa pudeur et par le graphisme au trait fin de Zep. Une belle réussite !
Gisèle et Béatrice de Benoît Feroumont, aux éditions Dupuis
Benoît Feroumont, pour ceux qui ne le savent pas, est l’auteur de la série de BD jeunesse Le royaume. Il nous a donc plutôt habitué a de la légèreté, de l’humour, même si déjà dans Le royaume, son héroïne, Anne, n’était pas du genre a se laisser marcher sur les pieds. Ici, il n’est plus questions ni de château ni d’oiseaux qui parlent, mais plutôt d’un conte sur les relations hommes-femmes et plus particulièrement sur les stéréotypes que la société met en place quand il est question de genre.
Béatrice est une working girl comme les autres, c’est à dire moins payée et moins bien considérée dans son job que l’ai un homme. Lassée par ces injustices et par les avances bien trop lourde de son patron, elle décide un soir de lui jouer un bien mauvais tour. Après une soirée bien arrosée, celui qui espérait profiter de sa jolie employée va se retrouver transformé… en femme. Béatrice va alors rebaptiser son ancien patron Gisèle et en faire sa femme de ménage et esclave sexuelle.
Avec cette bd, Benoît Feroumont passe de la jeunesse à un conte érotique, un véritable grand écart stylistique ! Le trait est plaisant, la fable se laisse lire avec facilité mais je suis restée un peu déboussolée, ne comprenant pas vraiment quel message retenir de cette lecture. Il est question de pouvoir, de domination, les scènes sont bien souvent érotiques, parfois drôle, mais une partie du propos m’a paru très extrême. A vous de voir !
On cherchait l’endroit idéal, isolé, tranquille. Une nuit, j’ai eu l’idée : Irus ! L’île d’Anton était en vente depuis sa mort, mon père venait de trouver un acheteur, on ferait d’une pierre deux coups : on partirait dans un endroit génial, et après une histoire pareille, le type ne voudrait plus l’acheter, Irus… l’île du Bonheur serait à nous pour toujours. Et le grand saut, on le ferait comment ?Là, Vlad a eu l’idée du siècle. En douceur, impossible à louper : il suffisait d’attendre la marée. Il avait fait fort le Prince des Ténèbres… un moyen aussi simple, je n’y aurais jamais pensé. Pas de sang, de violence, de boîte crânienne éclatée, ni de grosse langue noire ou de corps bleu pendu à une poutre.— Dommage, a dit Mishima qui aimait bien se la jouer gore.Il pensait déjà aux photos dans les journaux. Kim et moi, on aimait autant que ce soit clean, en plus on pourrait se regarder partir en se donnant la main, ce serait comme une estampe japonaise.
Mon avis :
Je suis tombée sur ce court roman au hasard d’un rangement dans la médiathèque. Le titre m’a intrigué, j’ai lu la citation de la quatrième de couverture qui m’a immédiatement convaincue de lire le reste du texte.
Le soleil et la mort, quel peut bien être le lien entre ces deux choses dans la tête d’Ulysse ? Et surtout qu’est ce qui peut le pousser à décider de mourir ?
Le roman est écrit à la première personne du singulier et j’ai réellement eu l’impression de lire une confession d’ado, un texte parfois froid, parfois dur, et d’autres fois empli de tendresse. Petit à petit, le lecteur s’attache à Ulysse, comprend sa douleur, mais surtout le lecteur se met à avoir peur pour lui, peur qu’il commette l’irréparable.
Les personnages qui entourent Ulysse peuvent sembler un peu caricaturaux, son père qui a du mal à prendre ses responsabilités, sa belle mère hostile, Kim, ado asiatique que son père refuse de laisser faire des études… Mais ça n’empêche pas le portrait d’être poignant. Et même si le dénouement ne m’a pas vraiment étonnée, j’ai pris plaisir à tourner jusqu’à la dernière page.
Voilà donc un roman très court, à peine 97 pages, mais riche en émotions. A lire à partir de 14 ou 15 ans, je dirai.
Été 1914. Le monde bascule dans la guerre. Comme tant d’autres, Baptiste Beaufils abandonne champs, moisson, famille et enfant pour aller défendre son pays. Juste avant qu’il ne parte, sa femme Camille lui confie un charme obtenu de la rebouteuse du village, Louise : une pierre de foudre, qu’il devra toujours garder autour du cou pour être protégé des projectiles ennemis. Mais ce n’est pas des lignes allemandes que provient le coup le plus terrible. Un mois après le début des hostilités, Baptiste apprend la mort accidentelle de son jeune fils Jules.
Mon avis :
Au départ, une bande dessinée sur la Première Guerre Mondiale, ce n’est pas vraiment ce qui m’intéresse le plus, je me suis pourtant laissée tenter avec l’avis élogieux d’une collègue.
Le premier tome nous entraîne dans la Grande Guerre avec les soldats, tous un peu perdus, dans la France du début du siècle dernier mélange de croyance et de superstitions. J’ai particulièrement apprécié l’atmosphère d’étrange qui règne dans ce tome. Le fantastique est très peu présent au départ, mais le lecteur sent très vite que le merveilleux et l’étrange ne sont pas loin. Le premier volume se termine sur un suspense qui m’a poussée à me procurer rapidement le deuxième, 1918.
Et c’est avec ce deuxième tome que se révèle la magie de la série. Après avoir basculé dans l’horreur suite au décès de son fils, Baptiste bascule maintenant dans le fantastique et l’incompréhensible. Alors qu’il pensait trouver la mort, il transite dans un monde inconnu, au cœur de la terre. Saura-t-il se donner une nouvelle chance ? Et le Long Hiver aura-t-il une fin ? Autant de questions dont j’ai attendu avec plaisir les réponses. Cette série en deux tomes est pour moi une réussite.
Résumé éditeur :L’histoire de Lilou, une petite fille solitaire dont la maman est hospitalisée, et d’Anita, une vieille dame qui habite toute seule dans sa petite maison en bord de mer. Un jour, elles se rencontrent sur la plage et vont d’aventure en aventure. Un récit d’amitié.
Mon avis :
Ananke est l’histoire d’une rencontre entre deux personnes seules, très seules, que leur solitude enferme. La jeune Lilou passe ses journées à se promener au bord de la mer, un peu abandonnée depuis que sa mère est hospitalisée, sans qu’elle arrive à le supporter. Anita est une femme âgée esseulée. Leur rencontre va les faire basculer dans un monde fantastique pour vivre une aventure qui changera leur vie et leur rapport aux autres.
Cette bande dessinée laisse planer le mystère entre rêve et réalité, elle est sublimée par des illustrations aux couleurs douces et au graphisme original. Malheureusement, j’ai eu du mal à me laisser porter par cette fable douce amère.
A conseiller pour un moment de rêverie, pour se changer les idées en période difficile.
Lisa
Un petit tour sur le site de l’auteur (en anglais) : Erwin Madrid